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L’approche de la stimulation basale d’Andreas Fröhlich

Temps de lecture : 8 minutes

Sommaire

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Mis à jour le 18/10/2023

Ce texte est une contribution du Groupe stimulation basale France.

En 1970, Andreas Fröhlich (et son équipe) ont développé dans leur institution, en Allemagne, « l’approche de la stimulation basale ». C’est avant tout une approche humaniste qui a débuté auprès de personnes en situation de grande dépendance dont le langage verbal n’était pas le principal moyen de communication. Andreas Fröhlich l’a approfondie de manière scientifique et élargie, en même temps, sur le plan théorique, philosophique, pédagogique, communicationnel, au cours des années suivantes. Cette approche propose des chemins de rencontre pour soutenir et cheminer avec la personne à partir de ses capacités à percevoir, à se mouvoir, à communiquer.

À ce jour, le groupe international, ainsi que les groupes de chaque pays, se réunissent une fois par an pour intégrer les nouvelles recherches et avancées dans l’approche qui n’est pas figée. Les formations pour les parents et les aidants augmentent chaque année.

Cette approche s’intègre autant dans la vie en famille que dans les institutions, les hôpitaux. Elle s’adresse, avant tout, à des personnes, du bébé à l’âge adulte, qui, de par leur grande vulnérabilité et quelle qu’en soit la cause, ont des difficultés pour gérer les actes du quotidien sans le soutien d’une tierce personne, avec une communication verbale déficiente. Elle n’est pas figée. Elle développe la créativité de chacun pour s’adapter à chaque situation et proposer des petites activités ou aménager l’environnement en partant des besoins de la personne accompagnée, et non de ce que l’on pense bien pour elle, quel que soit le lieu.

Elle est validée sur le plan international. Elle a commencé à apparaître doucement en France en 1985. Elle est accessible et ouverte à tous : parents, soignants, aidants, familles, sans prérequis.

Principes

a) Les activités de la vie journalière (AVJ) sont au centre de « l’approche de la stimulation basale ».

Un accompagnement « basal » est un accompagnement dans les domaines les plus élémentaires de la vie comme le coucher, les repas, le brossage des dents, l’importance de l’environnement, la notion du temps, la communication ainsi que les temps intermédiaires.

Les AVJ sont des actes routiniers, à vie, mais qui peuvent engendrer de grandes difficultés pour les aidants (quels qu’ils soient) et la personne accompagnée.

b) La communication non verbale, donc celle qui passe par le corps ET le corps de l’autre, est compliquée, malgré les bonnes intentions des aidants de vouloir bien faire, ou de faire selon des représentations personnelles. La rencontre est au centre.

La communication primaire (non verbale) passe par le corps de la personne à soutenir, mais aussi par le corps du soignant (parent ou autre). Cette approche demande, pour les aidants, de réfléchir sur leur « savoir-être ». Les bonnes intentions ne suffisent pas pour aller à la rencontre des enfants (ados, adultes) ayant un lourd handicap, à vie.

Les personnes polyhandicapées, au sens large, ont un bagage sensoriel perturbé qui ne leur permet pas vraiment de saisir le monde environnant ou de faire des expériences spontanées pour découvrir le monde et alimenter leur espace cognitif comme l’enfant normal. Il faut donc les soutenir. Ce soutien demande de s’appuyer sur des fondamentaux spécialisés.

C’est un aspect très important car, si les aidants partent de leurs interprétations, ou bien de ce qu’ils font naturellement dans leur quotidien, la rencontre ne peut que difficilement s’établir. Ce qui peut entraîner un épuisement sérieux et un sentiment de culpabilité de ne pas y arriver malgré l’énergie dépensée.

c) Pour le « savoir-faire », l’approche de la stimulation basale offre également des outils aux aidants :

  • Pour mieux comprendre les particularités sensorielles très spécifiques de ces personnes
  • Pour apprendre quelques techniques (inhabituelles parfois et contraire aux « normes ») indispensables, comme l’aide au repas, le brossage des dents, le coiffage, l’habillage, comprendre le temps et la durée, pour prendre en compte l’environnement…
  • Pour aménager des petits temps libres
  • Pour donner sens à quelques comportements interprétés comme inadaptés à nos normes

Le « savoir-être » et le « savoir-faire » sont étroitement liés. L’un ne va pas sans l’autre. Il est indispensable de connaître un peu et de maîtriser les règles fondamentales de cette communication élémentaire.

Ce n’est pas une « méthode ». La créativité n’est pas exclue, au contraire. Il y a « les fondamentaux spécifiques », comme socle de base et, ensuite, chacun, en fonction des moyens, du moment, du temps… va pouvoir adapter, aménager la rencontre, mais en s’appuyant sur ces fondamentaux qui offrent un socle de sécurité pour établir la confiance et la sécurité entre les deux partenaires.

Ces personnes vulnérables ont des compétences enfouies. Elles ne demandent qu’à émerger, pour qu’elles puissent vivre leur vie, avec ce qu’elles ont, et non celle que l’on voudrait pour elles.

Éthique et respect sont au centre.

« Pour de nombreuses personnes gravement handicapées, l’approche de la stimulation basale ouvre des possibilités de communication et de contact. Elle facilite l’accès au monde animé et inanimé, enrichit le quotidien et permet de réaliser des activités et un développement personnel. »

Andreas Fröhlich

Témoignage

Lucile, maman d’Alix, 26 ans, polyhandicapée – syndrome de Rett

« J’ai eu la chance de suivre deux formations en approche de stimulation basale, la première en 2006 (très pratique) et la seconde en 2019 (très théorique).

Lors de la première formation, Alix avait 9 ans, nous avions le diagnostic depuis un an et jusque-là je me débrouillais seule pour les besoins de ma fille et j’abordais la vie quotidienne selon mes convictions.

Cette première rencontre avec l’approche de la stimulation basale a été pour moi comme une bombe dans une piscine. Après le « boum », il y a les éclaboussures sur un rayon de dix mètres avec des effets collatéraux qu’il faut apprivoiser pour mieux gérer. Il y avait une telle différence entre ce que je croyais bien faire et ce qui était utile de faire que j’ai reçu comme une remise en cause de ce que je faisais en tant que Maman. Il m’a fallu une remettre en question, ce qui m’a permis ensuite de m’adapter aux besoins spécifiques d’Alix pour son quotidien. Il a fallu du temps, beaucoup de temps, cela se compte en années, l’envie de faire autrement et surtout de la patience pour mettre en place cette nouvelle approche pour communiquer avec ma fille.

J’avais à l’époque surtout besoin d’un soutien pour ce quotidien à vivre. Le quotidien est un mot bien facile pour un adulte sans soucis. Mais pour nous, parents d’enfant polyhandicapé, c’est du chinois. Alors on se débrouille comme on peut entre les troubles du sommeil, le brossage des dents impossible, le déshabillage et l’habillage qui devient vite un calvaire, le coucher qui n’en finit pas et les repas…

L’approche de la stimulation basale a rendu mon quotidien beaucoup plus simple, et a rendu la communication non verbale beaucoup plus fluide, ce qui a changé nos vies. Nous avons accompagné Alix pour qu’elle devienne actrice dans son quotidien : avant nous faisions pour elle, maintenant elle fait elle-même et elle décide !

Le réveil et le coucher sont devenus des moments de plaisir. L’habillage et le déshabillage sont plus fluides car accompagnés des mouvements d’Alix. Les repas et le brossage des dents sont devenus normaux. Quant au bain et à la douche, ce sont de purs moments de bonheur.

L’établissement où était accueillie Alix ne connaissait pas cette approche. Je les ai donc guidés sur des petites choses qui marchaient très bien pour le coucher, l’habillage, le déshabillage, la douche, le lever… Alix a pu au fil des ans être beaucoup plus réceptive à tout ce qui l’entoure, les bruits de la nature, la musique, les paroles, et elle est devenue extrêmement sociable. Alix devenant adulte, le choix d’un établissement MAS en internat allait se poser. C’était l’occasion de refaire une formation, sorte de piqûre de rappel. Les choses changent en plus de 13 ans et les formateurs aussi. Cette deuxième formation, beaucoup plus théorique que la première m’a, je dois le dire, laissée sur ma faim. J’étais tellement restée sur ma dernière formation très pratique ! En fait, j’étais tellement chamboulée à la suite de la première formation, et je voulais tellement bien faire, que mon cerveau avait occulté sans le vouloir une partie théorique de la première formation durant toutes ces années, ce qui ne me permettait pas de partager.

Avec le recul, la pratique quotidienne, je l’utilise H24, mais afin d’aller au-delà, c’est la piqûre de rappel de la théorie de cette deuxième formation qui m’a permis d’avoir les outils et les arguments pour le projet de vie et l’intégration d’Alix en internat temps plein dans une MAS dont une partie du personnel a été formé – certes il y a longtemps – à cette approche. Il s’agissait en effet de globaliser la démarche et de l’intégrer au contexte de la collectivité. J’ai pu dialoguer lors des réunions de mise en place du projet de vie d’Alix sur les besoins qui valorisent ses compétences, qu’elles soient motrices, éducatives, sensorielles ou émotionnelles.

Aujourd’hui, la stimulation basale a toute sa place et il y a une réelle continuité dans la façon de gérer le quotidien d’Alix, que ce soit dans sa maison (établissement) ou chez ses parents. »

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